La Maison des Sables et des Brumes __ André DUBUS III


Voici un roman magnifique à tous points de vue.

D'abord il est écrit dans un style impeccable: sobre, précis et élégant. Pas une seule faute ni de syntaxe ni d'orthographe, bravo à l'auteur et aux éditions Robert Laffont, collection pavillons poche, 2014, 582 pages.

Paru en anglais (USA) en 1999, il fut porté à l'écran en 2002 et remporta 3 Academy Awards en 2003. Les interprètes principaux en étaient Jennifer Connelly et Ben Kingsley.

Je n'ai pas vu ce film mais j'aimerais le voir s'il est à la hauteur du livre dont il fut tiré.

L'histoire commence presque banalement: une maison est saisie, par une erreur de l'administration et vendue à un prix très bas. L'acquéreur est un Iranien réfugié aux Etats-Unis, ayant perdu sa fortune et tous ses biens. Chez lui, il était très riche et très puissant, appartenant à une caste élevée. Il travaille durement désormais pour nourrir sa famille. Cet achat à un prix inespéré lui fait espérer redémarrer sa vie. Ses économies y passent presqu'entièrement, mais il compte bien revendre la maison au moins le double et ainsi commencer une carrière immobilière de plus en plus florissante. Quittant son emploi harassant, il s'installe avec sa femme et leur fils dans la jolie petite maison et y entame tout de suite des travaux. Il la meuble et la décore avec goût. Sa fille vient de se marier et il la reçoit avec grandeur dans son nouvel intérieur.

Mais il y a un hic et il est de taille: l'ex-propriétaire de la maison, obligée de s'en aller après avoir vidé les lieux, est parfaitement consciente de ne rien devoir à l'état et donc d'avoir été gravement lésée. En effet, l'erreur est reconnue, ce qui ne fait pas les affaires du nouveau propriétaire qui estime être chez lui et ne veut rien savoir de ce qu'il en est réellement.

Commence alors une lutte sans merci entre ces deux personnages, aussi désespérés et acharnés l'un que l'autre. La jeune femme est seule suite à une séparation très douloureuse, sans personne qui puisse l'aider. Elle n'a pas d'argent, gagne sa vie comme femme de ménage, cette maison est son seul refuge, l'héritage de son père...

La tension monte crescendo, dans ce récit à deux voix, où chaque protagoniste raconte son histoire, ses souffrances, le passé que chacun des deux traîne, la volonté farouche de s'en sortir. Cette maison devient le symbole de tout ce qui les sépare et les unit étrangement, à la recherche d'une vie meilleure...

Parfait de cohérence, de justesse, d'émotion sous-jacente, de suspens, de sentiments exacerbés, le roman déroule son fil et nous le suivons, fascinés...

Nous entrons de plain-pied dans la civilisation perse, son langage, ses coutumes, sa nourriture, sa musique. Quel raffinement! Tout cela faisant corps avec le reste du texte, sans longueurs, totalement abordable. Un régal!

D'autres personnages entrent en scène et jouent leur part de ce jeu tragique qui ne nous laisse aucun répit jusqu'à la toute dernière phrase.

Je l'ai lu à sa sortie en VO, ça fait longtemps mais je me souviens de cette tension incroyable qui monte tout au fil du roman!