Points : 576 pages
Harper Perennial: 463 pages

J'ai fini ce roman il y a environ deux mois mais j'ai séché sur l'écriture de la critique ! Je n'arrive pas bien à exprimer ce que ce livre m'a inspiré parce qu'il me reste des zones d'ombres... le mystère Oates, peut-être.

Tout comme la plupart des couples de leur hôtel, Ariah et Gilbert sont à Niagara Falls pour leur voyage de noces. Mais ce matin-là, Gilbert est parti, et il ne reviendra plus. Les chutes. Elles se sont révélées comme une solution évidente à ce mariage dont il ne voulait pas, cette situation cauchemardesque. Il est 6h15 du matin et Ariah dort encore.

Cet épisode lugubre va pourtant permettre à Ariah de rencontrer celui qu’elle n’aurait osé espérer. Le beau et riche avocat Dirk Burnaby va tomber sincèrement amoureux de cette femme rousse et maigre, que le monde extérieur tétanise. L’arrivée de Dirk procure à Ariah un bonheur immense, mais également une angoisse constante. Elle est persuadée qu’il finira par la quitter et se prépare à cette fatalité, car depuis la mort de son premier mari qu’elle n’aimait pas, Ariah s’estime maudite.

Le début du roman est très lent, et nous plonge d’ores et déjà dans l’atmosphère des années 1950. J’ai commencé par me dire que Joyce Carol Oates n’avait pas écrit l’une des plus célèbres biographies de Marilyn Monroe pour rien (Blonde). Le grand saut de Gilbert relève de la tragédie grecque, et la torturée Ariah aurait sa place dans un classique d’Hitchcock. Au milieu des faux semblants, Oates distille des éclairs de lucidité, retranscrits dans le texte en italique. Elle nous plonge dans un roman d’ambiance dont l’histoire a d’abord peu d’importance.

C’est avec l’arrivée de Dirk dans la vie d’Ariah qu'Oates injecte une dose d’intrigue, avec la sombre affaire du Love Canal et de la dame en noir, qui implique des pots de vin entre les industries chimiques de la région et des avocats que côtoie Dirk Burnaby (une affaire à la Erin Brokovitch). Ce dernier va investir son argent, ses journées et ses nuits dans cette affaire… jusqu’à ce que la situation ne lui échappe.

C’est avec surprise que l’on passe de la tragédie grotesque au drame sublime. Le couple mal assorti qui ouvre ce roman est gauche et prévisible : un mariage tel que celui de Gilbert et Ariah ne peut que mal finir, tandis que le couple Dirk – Ariah introduit une autre histoire presque indépendante qu’est celle du Love Canal. A travers ce roman, on suit les trois vies d’Ariah et, à chaque reprise, cette dernière tire un trait sur sa vie passée, comme si elle n’avait jamais existé.

L'atmosphère de Niagara Falls semble peser sur la vie d'Ariah, sans qu'elle n'envisage jamais de quitter cette ville, symbole d'amour et de mort. Ses enfants grandissent dans un foyer rempli de lourds secrets. Après un déroulement complexe et lugubre, l’issue du roman réunit ces trois parties dans un grand élan d’humanité.

Je l'ai acheté juste après avoir lu celui-ci