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vols secrets de la CIA (Les)
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Grey , Stephen
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C'était jusqu'à récemment l'un des secrets les mieux gardés des États-Unis : l'utilisation régulière par la CIA d'une flotte d'avions d'affaires, des petits jets privés, pour déplacer des prisonniers soupçonnés d'activités terroristes d'un endroit du monde à un autre, dans le cadre d'opérations baptisées « restitutions extra-légales ».
Le terme ne manque pas d'ironie quand on sait que ces suspects sont enlevés dans les rues de Rome, de Kaboul, de Stockholm ou de Sofia par des agents en t-shirt noir, jeans et rangers venus en avion privé de petits aéroports américains, sont embarqués, cagoulés et entravés sans pouvoir prévenir leur famille ou un avocat, et emmenés non pas aux États-Unis pour y être inculpés et jugés, mais en Égypte, au Maroc, en Syrie ou en Ouzbékistan pour y être torturés!
La loi et la constitution américaines interdisent les traitements inhumains ou dégradants. Mais livrer des suspects pieds et poings liés à des régimes complices qui n'ont pas de ces scrupules, étant eux-mêmes en guerre contre l'islamisme, et utiliser les aveux ainsi extorqués comme éléments à charge contre les détenus mais aussi d'autres suspects, voilà qui est considéré par la CIA et par la Maison Blanche comme une pratique moralement et juridiquement acceptable.
Stephen Grey a enquêté pendant des mois, sur trois continents, rencontrant des centaines de témoins, en particulier plusieurs victimes survivantes. Dates, heures, immatriculation des avions, plans de vol, nom des victimes.
Les arguments ne manquent pas : « Ah, le terrorisme est tellement dangereux, il nous faut accepter la torture car cela peut sauver des vies. »
Les terroristes sont certainement des gens dangereux car leur but est de démolir, avec n'importe quel moyen, notre système de démocratie et de valeurs occidentales; mais c'est quand même choquant que, pour combattre ces terroristes, nous renoncions nous-mêmes à des institutions fondamentales de notre système démocratique, nous renoncions au principe essentiel qui est celui des droits de l'homme et de la garantie des procès équitables, au système judiciaire.
Ce faisant, nous donnons une légitimation indirecte à tous ces gens qui, en présence de ces violations, ont aujourd'hui acquis la conviction de combattre un système qui est brutal, qui est illégal.
Et, surtout, ces actes illégaux peuvent créer un mouvement de sympathie envers ces auteurs d'actes de terrorisme.
Les États-Unis ont dit : pas de justice, pas de convention de Genève, on donne aux services secrets et au Pentagone toute latitude d'agir.
Combien de personnes disent et pensent : « Ce sont des terroristes! ». Et puis : « Ce ne sont que des musulmans. »
Quelle aberration! Nous sommes en train de commettre une erreur historique en criminalisant l'Islam. « Faut-il combattre la tyrannie avec les instruments des tyrans? »
Cette phrase émane d'un jugement de la Cour suprême des États-Unis par la juge Sandra Day O'Connor.
Une enquête fouillée et très dérangeante.
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Christiane Mélin
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Genre : Essai
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Édition : Calmann-Lévy, 2007, 504 p. , ISBN : 9782702137895
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| | Date :
9/1/2007
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