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salon des petites vertus (Le)
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Lapierre, Alexandra
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Celle qui nous a donné une biographie extraordinaire d'Artemisia
Gentileschi nous fait encore cadeau d'un bijou littéraire : Le salon des
petites vertus. Imaginez un salon où des femmes aisées qui, au
quotidien, fréquentent les clans universitaires, les missions
diplomatiques et les artistes régionaux, se réunissent chaque mercredi
chez leur hôtesse Émilie d'Entraygue pour partager leurs histoires et
leurs expériences. Italiennes de naissance ou par choix, elles ne se
gênent pas pour afficher leur francophilie portable ou leur goûts
cultivés. Condition incontournable de ces dîners-causeries : une invitée
est obligée de se raconter de façon engageante ou bien d'apprendre à ses
convives le vécu d'une connaissance. Ici on s'étonnerait que la
raconteuse désignée de la semaine ne s'autorise pas de quelques
adjonctions poétisantes pour faire avancer sa narrative.
Des commérages croustillants bourrés de ces euphémismes par litote qui
caractérisent le langage de la haute société! En l'occurrence, Alexandra
Lapierre s'avère elle-même une salonnarde engageante : on s'accroche à
chaque propos de cette auteure qui se veut notre interlocutrice la plus
fiable dans la satisfaction de nos curiosités.
Ce qui fascine dans ce texte, c'est la constellation davantage factice
que factuelle qui est censée nous renseigner sur la vie du personnage
principal de chaque histoire. L'ensemble relève d'un polar psychologique.
Que des potins banals montés de toutes pièces par des femmes hautaines
aux airs dédaigneux, direz-vous. Mais, écoutez, qui ne connaît pas une
mère célibataire qui dispute à une gouvernante l'amour de ses enfants,
une femme qui perd tout homme à sa mère, une directrice d'orchestre qui
exploite son charme pour réussir dans sa carrière, une adjointe
administrative qui se veut la protectrice reconnaissante d'un chef
d'entreprise charismatique et sympa ou bien un homme contrit qui se
confesse d'une lâcheté cruelle dans son passé à l'égard d'une femme
innocente? La vérité peut-elle être tout autre? Remarquez que les
convives doivent toujours jouer les détectives, séparer le bon grain de
l'ivraie et se garder de se faire induire en erreur par un rapportage
plutôt axé sur une exposition calomnieuse pour conforter les auditrices dans leur vision
du mondain. En fait, le dénouement de ces récits de vie ne manqueront pas
de surprendre. Aucun mot superfétatoire, aucun descripteur déplacé. Une
bonne salade niçoise, une baguette fraîche et une bouteille d'eau
accompagneraient bien l'appréciation de ces « portraits cruels à la
lumière de Rome ».
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Marcus Smith
(première critique)
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Genre : Fiction
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| | Date :
avant 2001
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