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Dupré, Louise
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En fermant le livre de Louise Dupré, j'avais le goût d'écrire le mot « gestalt » là où le mot « fin » pourrait paraître. Voilà la narratrice réconciliée avec quelques moments pénibles de son existence; c'est la boucle, la clôture qui vient enfin finir un événement qui était resté en suspens dans la mémoire et qui empêchait la narratrice d'avancer, qui l'obligeait à piétiner sur place et me voilà, moi la lectrice, heureuse de la tournure des événements. Après avoir suivi Emma dans les étapes de son deuil, j'accueillais avec satisfaction cette fin remplie d'espoir. Peut-être qu'Emma et Vincent arriveraient à mieux s'aimer en se tournant vers cette petite Emmanuelle de quatre ans et peut-être que toute la famille pourrait enfin retrouver la mélodie du chant de leur vie. J'ai beaucoup aimé le ton poétique de ce roman, le lyrisme, les jeux de mots, la musique des phrases... En lisant « j'avais attendu plus longtemps que l'attente, j'avais attendu si longtemps que je ne pouvais plus supporter le temps », j'entendais la détresse de cette femme qui ne sait pas où est passée sa mère, où s'en est allée sa sœur, le pourquoi du départ de son frère François ou de son Jérôme et qui porte ces abandons en elle de relations à relations sans jamais être gratifiée pour son attente fidèle et douloureuse... l'invisible toujours plus présent que le visible... Ce poème en quatre chants révèle aussi toutes les étapes du deuil. Du choc à la peine à la colère... et ce que j'ai surtout apprécié, c'est que l'auteure nous les fait vivre par le biais de petites anecdotes quotidiennes, de ces petits moments de rien du tout qui meublent notre existence : « Et moi, je ne veux rien garder, pas même les livres? Je fais un signe de tête, non. Puis je me ravise, pourquoi pas, tu avais quelques beaux livres, Judith a raison, le temps a passé, pourquoi ne pas les conserver? » Quelle belle façon de dire qu'Emma arrive à faire le bilan, qu'elle accepte l'héritage que lui a laissé Jérôme... c'est très touchant. Sans trop comprendre pourquoi, peut-être à cause du ton intime ou de la misère relationnelle humaine, ce livre m'a rappelé la lecture des livres Un certain sourire de Françoise Sagan ou Inutile et adorable de Roger Fournier. Les personnages n'arrivent jamais à vraiment se rencontrer et l'amour reste quasi toujours au niveau de la passion ou des sentiments. La gageure de l'amour, la durée, est perdue d'avance. Peut-être que mes cinquante ans exigent davantage de maturité ou d'actualisation de la part de ces êtres qui semblent à la merci des événements. Vincent, grand adolescent, part rencontrer Elena (personnage romantique dans l'ombre), Bénédicte a déjà été l'amante de Vincent, maintenant elle aime June, Jérôme quitte ses femmes comme il quitte le bureau... lorsqu'il est fatigué, François erre à la recherche d'un fantôme... Enfin, ils me faisaient tous et toutes un peu l'effet d'adolescents en quête de sens ou d'identité. Même la « maman » adhère à la philosophie romanesque de Flaubert... que c'est beau mourir d'avoir trop aimé... Je dois avouer que cela m'a agacée un peu...Reste que La memoria (avec son titre juste et bien choisi) m'a donné beaucoup de plaisir.
Suggestion(s) de lecture : La biographie de Gabrielle Roy par François Ricard
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Lysette Brochu
(14 critiques, cliquez pour les voir)
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Genre : Fiction
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avant 2001
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Livre(s) de Louise Dupré critiqué(s) sur le Guide
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