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Khalifé , Moustafa
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La coquille est le journal d’un prisonnier politique en Syrie. Un ouvrage exceptionnel où le narrateur - à partir de son expérience personnelle - raconte ses 13 années d’une double épreuve, l’enfermement et la torture dans les prisons syriennes, où il a été jeté au retour de ses études en France, et l’enfermement dans le silence, lui seul chrétien et athée dans une cellule de 200 prisonniers, tous plus ou moins « Frères Musulmans » qui le considèrent comme impur. C’est évidemment très dur, mais seule la lecture du livre peut rendre compte de cette épreuve.
Au delà de nous alerter sur la répression en Syrie, ce livre devient universel quand il nous place, comme les autres « classiques » de la littérature de l’oppression, Le ciel de la Kolyma de Ginzbourg, les premiers ouvrages de Soljenitsyne, celle des survivants des camps nazis, ou bien, plus récent, La fête au bouc de Vargas Llosa, devant un ensemble de questions terrifiantes : pourquoi tant de cruauté, pourquoi tant d’inhumanité, jusqu’où peut aller l’homme dans la cruauté et en même temps jusqu’où peut il aller dans la résistance et la volonté de survivre? Moustafa Khalifé se met ici au coeur de la question humaine.
Un passage reflète parfaitement l'état d'esprit dans lequel l'on se retrouve - par chance - « après » :
« De là mon refus de spéculer sur mon emprisonnement, mon refus d'être un héros... Je connais trop bien mes capacités. Je suis, tout simplement, un homme. Je suis lâche et peureux, au point de pouvoir m'uriner dessus de frayeur ; je suis courageux, robuste et obstiné, je peux tenir face aux pires méthodes de torture. Mais quoi qu'il en soit, je ne suis pas un héros. Je n'ai pas suivi ce chemin par choix, et on ne peut pas devenir un héros en suivant un chemin contre son gré. »
C'est parfaitement cela... comment mieux dire?
Poignant et d'une profonde humanité (ou l'inverse), mais qui montre que la survie n'est ni du courage ou de la passivité, jamais de répit non plus. C'est la capacité à rêver, s'évader de soi-même avant tout. Ensuite, le reste n'a qu'une toute relative importance, même le retour à une « normalité » qui ne sera jamais la même. Et qui relativise tous les emmerdements du commun.
Ce livre deviendra certainement un grand classique d'ici quelques années.
J'atteste la véracité et l'authenticité de certains passages... Les autres, je n'en sais pas plus que n'importe quel autre lecteur.
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Christiane Mélin
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Genre : Faits vécus
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Édition : Actes Sud, La bibliotheque arabe, 2007, 257 p.
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| | Date :
12/1/2007
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