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Fougère, Eric
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Eric Fougère est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages ayant en commun « l’usage et la poésie des lieux qui le conduisent à vivre une géographie du déplacement d’Amérique du sud en Océanie, des Comores aux Antilles où il enseigne et réside actuellement ».
Son dernier livre Retour des choses, publié aux éditions Pétra dans la collection « Pierres écrites », dirigée par Jeanne Bresciani, s’inscrit dans la lignée des grands récits de voyage, mais sans chronologie ni linéarité, guidé seulement par une géographie du souvenir et du sentiment (nous dérivons sans presque aucune transition, aucune date, de L’océan indien en Afrique, de la Méditerranée aux Caraïbes en passant par l’Espagne et les États-Unis pour finir par l’Europe). Le titre, lui-même, tout en jouant sur le sens (que l’on peut ressentir poétique ou désenchanté) est explicite : que reste t-il des choses vues, traversées, des sensations éprouvées, une fois terminé le périple, autrement dit, une fois revenu à soi, au point d’ancrage, arrimé à la feuille blanche, au temps immobile de la mémoire et de l’écriture ? : « Tout arrive en revenant de loin comme un écho, comme un reflet, comme un effluve. Il règne une rondeur en demi-teinte hors du temps, pour ainsi dire hors du monde ».
Avec l’écriture, c’est, en effet, un autre voyage qui commence, à la manière d’un Julien Gracq qui rappelle constamment « qu’il fait le récit d’un souvenir de promenade, que tel événement apparaît comme un appel à une réponse qui ne sera venue que plus tard » à la façon d’un autre écrivain aussi, Maurice Roche, qui affirmait que « c’est de l’intérieur qu’il faut aller aux choses ».
Ce qui contredit momentanément l’effet de mise à distance est assurément l’essence même de son expression poétique : « la façon dont un ciel blanchit, de nacre écaillée, pareille à la façon dont il noircit quand la nuit monte – elle ne tombe pas comme on le dit mais saisit les choses à la racine et de là, vague après vague, submerge l’étendue ». En présence de ce très beau texte, nous sommes confrontés à une tentative d’exploration du réel qui est en fait une exploration du langage, de ses champs, de ses passages, de ses confins : « Quand la réalité fuit, quand chaque instant court après un oubli qui le fait s’enraciner dans sa perte, une issue possible est le style, au sens où dans les mots ce qui manque est ce qui parle, où ce qui nous échappe, à commencer naturellement par les mots, revient décuplé par l’inadhésion de la langue à ce qui s’y désigne… Le souci des choses est un antidote au chagrin du monde. »
Le retour des choses par un long détour d’écriture est aussi un retour sur soi.
Suggestion(s) de lecture : Dans la même collection : Les vestiges de Janvier de Jeanne Bresciani
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Signe
(première critique)
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Genre : Voyage et Tourisme
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Édition : Éditions Pétra, 2007, 187 p.
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| | Date :
10/1/2007
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