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Kauffmann, Jean-Paul
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La lutte avec l'ange est une oeuvre de Delacroix peinte sur les murailles de l'église Saint-Sulpice : figuration d'un épisode de la Bible dans lequel Jacob lutte avec un ange, messager de Dieu, et l'emporte au prix d'une infirmité qu'il traînera toute sa vie.
Une oeuvre d'art a plus à nous faire dire qu'à nous dire,
rien ne l'illustre mieux que le livre de Jean-Paul
Kauffmann : c'est que l'oeuvre de Delacroix le regarde plus
qu'il ne la regarde; ça le regarde au creux même de sa nuit,
de la passion qu'il croit fuir sans bouger dans d'immenses
efforts dirait Baudelaire.
Que la chair soit une prison, un défi ou une épreuve de
chaque vie, c'est à chacun d'en décider par son courage. Et
ce qui nous définit peut-être le mieux, c'est notre rapport à
ce mal originel, au handicap d'une passion qui fait de nous
des infirmes.
Avec l'auteur, nous nous embarquons dans une enquête, une de
ces enquêtes en cercles concentriques chères à Maigret,
animé que nous sommes d'un fol espoir : trouver la vérité
dans une interprétation, à la recherche du sens d'une oeuvre
et de notre condition. Nous partageons l'illusion de traquer
le moi du peintre rendu sensible, sans nous douter, pauvres
fous, que cette quête de sens va inexorablement nous ramener
à nous-mêmes, à la nuit de l'épreuve, au cour du problème
(heart of the matter) que hante le désespoir, comme si la
lutte avec le bien ressemblait étrangement à une lutte avec
le mal!
Épreuve, présence à soi, passion, tentation semblent
conjuguer atrocement le bien et le mal, au point que
l'illusion de pouvoir enfin fuir sa prison en jetant la
lumière sur la prison d'un autre éclate comme résultat et
bilan de l'enquête. On ne peut fuir l'épreuve,
l'incontournable passion.
Nous ne sombrerons pas dans cette détestable habitude de
réduire l'oeuvre à la vie de l'auteur et, ce qui nous y
encourage, c'est que par son texte, par son style frémissant
et contenu, l'auteur nous élève à l'universel, nous renvoie
à cette nuit dans laquelle nous nous débattons en marchant
vers une lumière qui ne peut nous délivrer : Kauffmann, en s'expliquant avec Delacroix, est renvoyé à sa propre épreuve comme un hibou aveuglé par le soleil, mais il nous entraîne à sa suite dans un feu d'artifice d'esprit et de culture.
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Christiane Mélin
(332 critiques, cliquez pour les voir)
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Genre : Fiction
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7/1/2005
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