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Lesage, Aline
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Une tentative d’avortement, ce n’est jamais anodin. Mais dans les années 1910, dans un Québec où le clergé carbure à la culpabilisation, cela laisse des traces particulièrement indélébiles. C’est ainsi que, lorsqu’elle confesse son geste – qui n’a d’ailleurs pas abouti –, Gabrielle Chevalier se fait répondre qu’elle ne doit pas s’attendre à recevoir le pardon divin de sitôt. Le prêtre la fait jurer qu’elle s’occupera d’elle-même et de l’enfant qui a réchappé de cette tentative jour et nuit jusqu’à la fin de ses jours. Quoi de plus naturel pour une mère? Mais quand le fait de s’occuper de son enfant devient une « pénitence », on ne vit pas sa vie de mère comme les autres.
À 18 ans, sa fille meurt en raison d’un handicap de naissance. Gaby, qui a d’autres enfants mais vit un mariage morne, se laisse convaincre de faire un voyage en Europe avec une amie. À Paris, elle rencontrera par hasard un nommé Émile Nanterre, qui remuera son coeur d’une façon qu’elle n’a jamais connue jusqu’ici. De retour au pays après un mois, elle ne réussira pas à oublier son Émile. Quelle est la part de liberté qui lui reste?
La première partie du roman (enfance de Gaby, début de l’âge adulte et premières années du mariage) comporte quelques longueurs, mais le récit s’envole dès le moment où l’héroïne rencontre Émile Nanterre et entreprend, à l’aube de la quarantaine, la grande histoire d’amour de sa vie. Le récit se caractérise par une grande pudeur : pas de longues tirades ni de déchirements, malgré les dilemmes et les drames que vivra Gabrielle. Tout se passe dans l’intimité du coeur, sans épanchements, comme bien des femmes de cette époque vivaient leur quotidien et leurs émotions.
Chemin faisant, cette histoire nous fait découvrir ou redécouvrir toutes sortes de détails sur la vie matérielle ainsi que sur la société québécoise des années 1910 à 1940.
Aline Lesage est née à Québec, mais elle vit dans l’État de Washington, et son amour de la langue d’Alison Lurie l’a incitée à écrire en anglais. Cette affection est palpable dans son riche vocabulaire et son écriture soignée, presque précieuse. Puisque les personnages sont francophones, le texte n’en est pas moins émaillé de mots et de répliques en français qui donnent au roman une drôle de « couleur locale » à l’envers et un aspect hybride qui ajoute à son charme et à son intérêt.
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François Lavallée
(210 critiques, cliquez pour les voir)
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Genre : Fiction
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Édition : Universe, Lincoln (Nebr.), 2006, 325 p. Lu en anglais
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1/1/2007
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