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Martin, Claire
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Je suis tombée par hasard à la librairie sur les deux volumes de Dans un gant de fer (Volume 1 - La joue gauche et Volume 2 - La joue droite) que j'avais lus adolescente. Je me souviens que ces volumes avaient causé tout un émoi dans ma famille à leur parution... J'en gardais un vague souvenir de récits à propos d'une enfance passée dans des couvents de religieuses. J'ai donc eu envie de les relire et je les ai achetés.
Quelle lecture... et surtout quelle écriture! Le contenu me fait un peu penser à ce dont nous avions discuté sur la liste en octobre dernier, au sujet du livre publié par les sœurs Hilton et où Suzanne avait très justement apporté que ce genre d'ouvrage peut être un moyen pour les victimes d'exorciser leur douleur. Claire Martin a sans doute tenté ici de se vider le cœur au sujet de tout ce qu'elle (ainsi que ses sœurs et, à un autre niveau, ses frères) ont eu à endurer à la maison avec un père violent et ensuite au couvent avec des religieuses sadiques.
Je n'ai fréquenté l'école dirigée par des religieuses que pendant mes trois premières années de scolarité (de 1960 à 1963). En 1964, c'était le début de la Révolution tranquille au Québec et le Rapport Parent sur l'éducation a signé la sortie des congrégations religieuses des écoles publiques et l'entrée des professeurs laïcs. Mais de ces trois années-là, j'ai assez de souvenirs pour vous dire que ce que Claire Martin raconte est très vraisemblable. Et encore, je n'étais pas pensionnaire... Bigoterie, étroitesse d'esprit, moqueries d'une méchanceté incroyables envers les fillettes pauvres ou désavantagées par la nature, commentaires sournois et pervers, j'ai vu et entendu tout cela.
Pour le contenu, Dans un gant de fer est donc à mon avis un témoignage important de ce qui se passait au Québec dans les écoles de filles au cours des années 1920-1940. Elle a eu la malchance d'avoir en plus un père violent et bigot dans un Québec saturé par la religion, de telle sorte qu'elle ne savait plus ce qui était le pire : être à la maison ou être au couvent! Sa situation n'est sans doute pas représentative de ce qui se passait dans tous les foyers du Québec à cette époque, mais donne quand même une bonne idée des mentalités du temps et du chemin parcouru depuis... ne serait-ce que pour la protection de la jeunesse et pour l'obligation, pour toute personne qui a des doutes sérieux, de déclarer un enfant qui paraît victime de mauvais traitements.
Mais sur le plan de l'écriture, alors là... Je me souviens que lorsque j'ai lu Les liaisons dangereuses, un ami avait fait un commentaire disant que, pour apprendre enfin comment utiliser l'imparfait du subjonctif, c'était le livre idéal. Je ne sais pas si Claire Martin avait lu Choderlos de Laclos (c'était sûrement à l'index!) mais j'avoue que l'utilisation courante de ce temps de verbe dans un livre contemporain m'a mise sur les fesses! L'écriture est vraiment de qualité supérieure à ce qu'on a l'habitude de voir dans ce genre de livre (sans vouloir discréditer le contenu des autres ou le vécu des victimes).
Bien qu'elle s'en défende au début en disant qu'elle a vraiment pardonné à son père, je crois que ces volumes constituent un règlement de compte pour une enfance (et bien plus qu'une enfance) complètement brisée.
C'est à ne pas manquer.
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Libellule
(63 critiques, cliquez pour les voir)
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Genre : Faits vécus
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Édition : Bibliothèque québécoise
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3/1/2005
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